«Est-ce qu’on peut discuter du fait que 8,8 millions de streams et 2 000 vinyles vendus cette année ont rapporté la même chose à Galaxie 500 ? Je n’exagère pas, le même montant. » Sur Twitter, Damon Krukowski, batteur du groupe de rock américain Galaxie 500, actif à la fin des années 1980, est l’une des voix les plus actives contre le modèle actuel du streaming et contre Spotify en particulier, qui domine le secteur au niveau mondial. À ses côtés, les reproches de musiciens ou de maisons de disques se sont mêlés et organisés un peu partout tout au long de cette année 2020 si particulière, où les artistes privés de concerts ont réalisé à quel point leurs chansons enregistrées ne leur permettent pas de vivre (lire l’épisode 1, « Artistes et streaming, je ne t’aime plus mon amour »). Et peut-être moins à l’ère du streaming que jamais, selon cette fronde qui n’en finit pas de monter et qui s’adresse autant aux plateformes (Spotify, Deezer, Apple Music, YouTube) qu’aux plus gros labels qui ont une nouvelle fois verrouillé le système (lire l’épisode 2, « Les maisons de disques, complices du stream ») à l’avantage des seuls artistes ultravisibles.
Nous avons déjà parlé des problèmes structurels que pose le streaming, qui expliquent le malaise actuel qui se répand chez les musiciens. Mais, lorsque l’on enquête sur ce sujet, c’est une relation complexe qui apparaît aussi entre les différents acteurs actuels de la musique, une mutation inachevée et une difficulté à se comprendre entre deux mondes aux envies bien différentes. En creusant, on se rend ainsi compte que les artistes et les labels les plus critiques envers le streaming sont aussi souvent ceux qui s’en tiennent les plus éloignés