Deux sites ont déjà pris la suite de What.cd, la gigantesque bibliothèque de liens torrents débranchée le 18 novembre à la suite à une enquête de la Sacem. Fermé en 2007 pour mise à disposition d’œuvres protégées par le droit d’auteur, Oink’s Pink Palace aussi avait eu deux principaux rejetons : What.cd et Waffles. L’histoire se répète souvent en matière de lutte contre les échanges hors marché, et on peut se demander si la domination croissante du streaming sur notre façon d’écouter la musique y mettra fin.
Comme je l’expliquais dans l’épisode précédent de La fête du stream (lire l’épisode 3, « Les irréductibles téléchargeurs »), les ayants droit de la musique cherchent depuis le début des années 2000 à assécher l’offre considérée comme illégale pour faciliter l’émergence de plateformes payantes dûment labellisées. Mais des poches pirates demeurent. Elles sont parfois ouvertement hors-la-loi et bien difficiles à défendre, à l’image du site Zone Téléchargement, fermé dans la foulée de What.cd, qui rapportait beaucoup à ses gestionnaires via la vente massive de publicités. D’autres sont les héritières du partage désintéressé né avec l’internet grand public au milieu des années 1990, que Soulseek, les blogs MP3, Oink et What.cd ont fait perdurer tout au long des années 2000.
Tous ces services ont (ou avaient) pour point commun de ne pas afficher de publicité et de n’exister que par l’investissement – y compris financier – de leurs utilisateurs. Avec les années, de nombreuses études indépendantes ont également montré que si le téléchargement illégal en général entraîne une baisse de l’achat de musique chez des mélomanes à la faible consommation, la tendance s’inverse largement pour les internautes qui proposent et échangent beaucoup. Mais les ayants droit ne font pas cette distinction. Un pirate est un pirate, et les longs combats législatifs des années 1990-2000, du traité de l’Organisation mondiale de la propriété intellectuelle en 1996 à la loi Dadvsi en France dix ans plus tard, leur ont principalement servi à empêcher toute transformation du droit d’auteur qui aurait pris en compte l’émergence d’échanges non marchands entre particuliers.
Pour permettre au légal de se développer, il faut réguler l’illégal.
« Pour permettre au légal de se développer, il faut réguler l’illégal, résume David El-Sayegh, le secrétaire général de la Sacem.