Les 73 secondes sont magnifiques, comme seule Canal+ sait les produire. Ralenti sur les visages tendus par le stress, des mots saisis sur les murs, « Hope » et « Love », des femmes qui boxent, des femmes qui arbitrent, des enfants, un footballeur genou à terre, poing levé contre le racisme, les flammes qui lèchent la vie du pilote de Formule 1 Romain Grosjean, le logo de la chaîne sur le ballon du rugby, un motard qui se signe, la sueur et les larmes sur le visage de Neymar et le slogan, avec la voix de Benjamin Biolay s’il vous plaît, en signature de cette bande-annonce, tout juste publiée, des compétitions sportives disponibles chez Canal+ : « Pour vivre ensemble ces moments-là. » Oui alors, ensemble, pas tout à fait, ça dépend. Selon nos informations, trois pigistes des sports de Canal+ ont été virés lundi. Un texto, un coup de fil, bye-bye. La raison ? Ils ont signé, en décembre dernier, un communiqué de la Société des journalistes de Canal+ en soutien à Sébastien Thoen.
Eh oui, encore et toujours cette éviction de l’humoriste coupable d’une parodie de CNews. On moque la chaîne info maison ? Dehors, Sébastien Thoen. On salue ledit Thoen à l’antenne ? Dehors, Stéphane Guy. On signe un texte contre le licenciement de Thoen ? Dehors, les trois pigistes. En novembre dernier, à Sébastien Thoen (lire l’épisode 144, « Souriez, vous êtes viré »), la direction de Canal+ avait justifié ainsi son renvoi : « Décision de l’actionnaire ». Cette fois, le nettoyeur envoyé par Vincent Bolloré s’appelle Didier Lahaye, ancien producteur maison des émissions sportives de Canal+ et directeur adjoint des sports depuis 2016. Pour les trois pigistes renvoyés, la procédure a été la même. Un texto de Didier Lahaye à l’intéressé suivi d’une conversation par téléphone pour annoncer que, désormais, Canal+ se passerait de ses services. Raisons invoquées par Didier Lahaye : la pétition en faveur de Sébastien Thoen, « la confiance rompue », « le manque de loyauté ».
Ils n’avaient pas tort, les journalistes de Canal+, de manifester cachés derrière des masques à l’effigie de Stéphane Guy leur soutien au commentateur viré pour un salut à Thoen à l’antenne (lire l’épisode 148, « Stéphane Guy, les vengeurs masqués »). Ils n’avaient pas tort, ce même 5 janvier, au pied de l’immeuble de Canal+, d’expliquer ainsi leur geste :