«Les palourdes ressemblent à des testicules. Et des études ont montré que les palourdes sont idéales pour la santé des organes reproducteurs mâles. » L’affirmation est aussi folle que floue. Les études en question ne sont pas citées. Normal, elles n’existent pas. Ça n’a pas empêché un article défendant cette idée saugrenue d’être partagé plusieurs dizaines de milliers de fois sur les réseaux sociaux ces dernières semaines. Avec ce genre de commentaires de lecteurs : « Merci de m’informer sur toutes les vertus des aliments. »
Ce billet est loin d’être un cas isolé. Les sites, pages, groupes et auteurs bidon ont bien compris le désarroi de nos contemporains autour du bien manger, du bio et de la santé et ils l’exploitent en publiant des tonnes de fake news. La plupart sont très inventifs… mais utilisent toujours ou presque les mêmes ressorts : ils vous vendent soit des pseudo-recettes qui soignent – surtout le cancer –, soit un complot de l’industrie pharmaceutique, soit les deux. Leur modèle est simple : ils comprennent tous un ou plusieurs bandeaux publicitaires et des rubriques « Vous aimerez aussi », « Contenus sponsorisés », « Partenaires », etc. Plusieurs de ces sites dépassent le million de visiteurs par mois, ce qui peut rapporter quelques milliers d’euros de revenus publicitaires. Certaines pages Facebook ont des méthodes plus subtiles : elles publient contre rémunération des liens vers d’autres sites. Selon une enquête menée par Buzzfeed en 2015, cela peut rapporter entre 2 et 5 euros pour 1 000 clics générés.
Récemment, j’ai ainsi lu un article qui assure : « L’industrie pharmaceutique ne veut pas que vous connaissiez cette recette miracle. » J’ai cliqué, et j’ai découvert une tisane à base de miel, de jus de citron et de feuilles d’aloe vera. TREEEEEMBLE, industrie pharmaceutique. En essayant de retrouver la source de cette info, je me suis perdu dans une farandole de sites farfelus. Idem pour un billet d’un autre site spécialiste de la fake news bio qui assure que « la coriandre peut supprimer 80 % des métaux lourds de l’organisme en 42 jours ».
On aurait bien envie de se marrer devant tout ça, si les fausses infos autour du bien manger n’avait pas autant d’influence. Une étude, publiée début février par l’université d’Oxford, s’intéressait au succès des sites de désinformation en Europe, en se basant notamment pour la France sur les données de l’annuaire Décodex, lancé par Le Monde.