Entre 2008 et 2022, près d’une victime de féminicide sur cinq était âgée de 70 ans ou plus
Il existe pourtant très peu d’études sur ce sujet : ces séniores semblent exclues de la réflexion sur les féminicides en particulier (lire l’épisode 1, « Une femme tous les trois jours »), de celle sur les violences conjugales en général. Lorsque des femmes de 70 ans ou plus sont tuées par leur conjoint, l’explication du grand âge, de la maladie ou de l’épuisement d’un aidant à bout est souvent avancée. Ceci étant, il est nettement plus rare que les femmes aidantes étranglent ou abattent d’une balle dans la tête leur mari malade. Dans son rapport de 2007, la DAV estime que « c’est bien sûr parmi les personnes âgées que l’on trouve le plus grand nombre de contextes de maladies, de drames liés au grand âge, voire d’“euthanasies” ». L’année d’après, le service statistique nuance : « Il est toutefois difficile de déterminer précisément l’accord de la victime, hors consentement expressément acté ou manifesté auprès des proches. »
Pour tenter de comprendre, Les Jours ont interviewé Margot Giacinti, docteure en science politique et rattachée au laboratoire Triangle, une unité mixte de recherche du CNRS (Centre national de la recherche scientifique). Dans sa récente thèse réalisée à l’École normale supérieure de Lyon et intitulée « “Quand il n’y a pas mort d’hommes” : socio-histoire du féminicide en France (1791-1976) », la chercheuse s’est intéressée aux féminicides dans une double perspective socio-historique. Comment les meurtres de femmes sont-il appréhendés en France avant que le concept de féminicide ne s’impose et comment sont-ils jugés aux assises depuis la Révolution française ? Aujourd’hui, elle étudie « les meurtres contemporains commis sur les femmes âgées en France en s’interrogeant sur leurs déterminants sociaux et sur la possibilité de les qualifier en féminicides ». À notre connaissance, ce travail est une première dans l’Hexagone.
Pourquoi parle-t-on si peu des féminicides de femmes âgées ?