Fin septembre 2015, les États-Unis apprennent stupéfaits la démission du speaker de la Chambre des représentants, le républicain John Boehner. Choisi en 2011 par ses pairs conservateurs, ce sémillant élu des banlieues bourgeoises de Cincinnati, dans l’Ohio, au teint toujours halé par la fréquentation assidue des golfs et des country clubs, était devenu le visage de l’opposition au président Barack Obama. Mais cette opposition s’était toujours voulue constructive et la démission de John Boehner est en ce sens sacrificielle. Il fait alors ce choix pour ne pas céder à la pression de la frange la plus droitière du groupe républicain, réunie depuis 2015 sous le nom de House Freedom Caucus. Cette minorité d’élus de droite radicale voulaient échanger la suppression totale du financement du Planning familial contre leur soutien à une rallonge budgétaire évitant une interruption des services de l’État fédéral par défaut de paiement, le fameux « shutdown ». Mené par l’élu de Caroline du Nord Mark Meadows, le House Freedom Caucus menaçait même, au cas où John Boehner essaierait de pactiser avec les démocrates, d’utiliser pour la première fois en un siècle la procédure dite de « motion to vacate the chair », la motion de destitution du speaker. Si le départ de John Boehner les prive alors de ce levier, Mark Meadows et Jim Jordan, l’autre cofondateur du House Freedom Caucus, parviennent néanmoins à empêcher le numéro 2 du démissionnaire, Kevin McCarthy, d’accéder au poste de speaker. Les républicains finissent ensuite par se coaliser autour de l’ancien candidat à la vice-Présidence en 2012, Paul Ryan. Les concurrents du parti à la présidentielle 2016, alors en pleine surenchère droitière, applaudissent à la démission de John Boehner, à commencer par Donald Trump, magnat new-yorkais en quête de crédibilité conservatrice.
En 2023, les mêmes acteurs, ou presque, viennent de jouer l’acte final de la pièce entamée il y a huit ans. Et elle a abouti à l’élection, ce mercredi 25 octobre, de Mike Johnson, l’un des plus fidèles de Donald Trump, l’un des plus à droite aussi. Retour en arrière. Début octobre 2023, le House Freedom Caucus, désormais emmené par le représentant de Floride Matt Gaetz, en liaison directe avec l’ex-Président Donald Trump depuis son refuge de Mar-a-Lago, déclenche le vote d’une motion de destitution contre Kevin McCarthy. Ce dernier, devenu speaker en janvier 2023, au prix de concessions faustiennes à l’extrême droite de son groupe (lire l’épisode 8,