Un mois pile après la mort de Nahel M. et les émeutes qui l’ont suivie (lire l’épisode 1, « Nahel M.: les tremblements de Nanterre secouent les quartiers »), un agent en poste dans la capitale décrit aux Jours l’état d’esprit qui secoue la police : « C’est un mouvement de déception, de ras-le-bol et de colère. Ils nous ont usés jusqu’au bout, alors on est malades. » Et depuis une semaine, ils seraient nombreux à l’être. « Il y a environ un millier de policiers en arrêt maladie, surtout dans le Sud mais aussi en Île-de-France », nous affirme Éric Henry, porte-parole du syndicat majoritaire et très droitier Alliance. D’autres effectifs ont préféré se mettre en « code 562 » : cela signifie qu’ils limitent leur activité aux missions essentielles et urgentes. Si l’ampleur de cette mobilisation est difficilement quantifiable
Parti de Marseille, le mouvement se propage désormais à la région parisienne. « Chez nous, ça commence à prendre et c’est comme ça pour toute la grande couronne et Paris, nous confirme un commissaire en poste en Île-de-France. Pas encore au point de perturber le service, mais ça pourrait avoir des conséquences réelles et graves pour le service public. J’ai entendu qu’il y avait des commissariats où il n’y a que les officiers et le commissaire pour garder les locaux. C’est un peu Rome, ville ouverte. » D’autres territoires comme le Nord-Pas-de-Calais, le Grand Est ou la Bretagne commencent eux aussi à être touchés par cette grève qui ne dit pas son nom.
Ce qui est arrivé à ce collègue pourrait arriver à n’importe quel policier. À Marseille, on s’est fait tirer dessus, des personnes en voulaient à notre intégrité physique.
« Ce qui devait arriver est arrivé, constate Denis Jacob, le secrétaire général d’Alternative Police CFDT. La colère, le mal-être et le mécontentement sont latents depuis des années. La situation est complexe et ne se cantonne pas qu’à l’affaire de Marseille. Mais cette décision est totalement incompréhensible pour les troupes. » « L’affaire de Marseille », c’est le placement en détention provisoire d’un policier de la BAC de la ville, le 21 juillet dernier, mis en examen avec trois autres fonctionnaires pour violences en réunion par personnes dépositaires de l’autorité publique, survenues pendant les récentes émeutes urbaines. Son incarcération a mis le feu aux poudres.