Un gouvernement qui prévient lui-même que le texte adopté au Parlement va être censuré, une partie de l’opposition (Les Républicains, LR) qui rédige un mémoire pour le défendre… Les conditions d’examen ce jeudi de la loi « immigration » par le Conseil constitutionnel ne sont pas banales. Le 8 janvier, à l’occasion de ses vœux, Laurent Fabius avait indiqué à Emmanuel Macron que l’institution qu’il préside « n’était ni une chambre d’écho des tendances de l’opinion, ni une chambre d’appel des choix du Parlement, mais le juge de la constitutionnalité des lois ». L’ex-plus jeune Premier ministre de France (détrôné il y a quinze jours par Gabriel Attal) a peur d’être instrumentalisé par le président de la République. Et on le comprend. S’il ne censure pas les dispositions ajoutées à l’initiative de la droite sénatoriale (lire l’épisode 2, « La Macronie donne les pleins pouvoirs à la droite ») et validées à contre-cœur à l’Assemblée nationale par la majorité macroniste (lire l’épisode 8, « L’extrême droite en marche »), Laurent Fabius sera considéré comme un piètre gardien « des droits et libertés », une des missions que le Conseil s’est lui-même données. S’il annule la plupart des articles litigieux, le gouvernement criera victoire. Énervant… Surtout qu’il ne fait guère de doute que le texte adopté comporte nombre de dispositions anticonstitutionnelles. Le ministère de l’Intérieur évoque une dizaine de mesures contestables, des associations de défense des immigrés une trentaine. On fait le point sur les plus significatives.
Selon le gouvernement, l’objectif de la loi est de « contrôler l’immigration » et d’« améliorer l’intégration », pas de modifier le Code de la nationalité (qui dépend du Code civil). Or nombre des articles rédigés par les sénateurs portent sur ce sujet. L’article 1er exige un niveau de langue minimum pour obtenir d’être français. L’article 2 bis A ajoute un motif de déchéance de nationalité à l’article 25 du Code civil en cas de condamnation pour « homicide volontaire commis sur toute personne dépositaire de l’autorité publique ». L’article 2 bis demande aux personnes nées en France de parents étrangers de « manifester leur volonté » d’acquérir la nationalité à leur majorité (une remise en cause du droit du sol automatique que la droite avait déjà fait adopter dans les années 1990, avant que la gauche ne rétablisse l’ordre). Toutes ces dispositions sont appelées des « cavaliers législatifs » et contreviennent à