Oh mais en voilà une surprise : Vincent Bolloré met la main sur le groupe Lagardère ! Alors ça… Que celui qui est étonné lève le doigt. Non, pas toi, Arnaud, ça vaut pas. Sacré Nono… Sacré Nono Lagardère qui, s’exprimant le 5 septembre dernier dans son futur ex-journal, Le JDD, criait son amour à Vincent Bolloré, se disait « passé en mode conquête » comme un winner des années 1980, vantait un actionnariat « pacifié, tout le monde se parle, il n’y a aucun conflit », et même qu’il était « totalement hors de propos d’évoquer une disparition de l’empire »… Et puis la fin de l’histoire attendue depuis le début est tombée ce mercredi soir dans un communiqué du groupe Vivendi, détenu par Vincent Bolloré : on se le bouffe, ce Lagardère.
Les termes du communiqué sont un peu plus châtiés : « Amber Capital a proposé à Vivendi, qui l’a accepté, d’acquérir sa participation dans Lagardère. » Amber, c’est le fonds d’investissement de Joseph Oughourlian qui détient 18 % du groupe Lagardère et cherche des poux dans la tête de Nono qu’il accuse de couler l’empire. Amber, surtout, s’est allié à Vincent Bolloré qui, action après action, règne sur 27 % de Lagardère. 3 % de plus et c’est un contrôle de fait de la boîte et l’obligation, sitôt passé le cap des 30 %, de déclencher une offre publique d’achat (OPA) pour entériner ce contrôle. Et voilà qu’Amber vient de décider de vendre ses parts à Vivendi qui va se retrouver avec 45 % de Lagardère, en échange de la somme bien coquette de 600 millions d’euros. Avec cette OPA, Vivendi doit également proposer de racheter leurs parts aux autres actionnaires, soit Bernard Arnault (10 %), le Qatar (12 %) et un certain Arnaud Lagardère (11 %).
La fin de l’histoire était d’ailleurs écrite noir sur blanc dans le deal conclu le 11 août 2020 entre Amber et Vivendi. Concluant un pacte d’actionnaires, ils s’alliaient pour exiger d’être représentés au conseil de surveillance de Lagardère en regard de leurs parts du capital et s’accordaient un « droit de première offre réciproque » sur leurs actions chez Nono. En juin dernier, contraint et forcé, Arnaud Lagardère leur a cédé des représentants en son sein, a lâché son pouvoir de la commandite qui le protégeait d’une éjection (lire l’épisode 15, « Lagardère : 99 minutes pour survivre à Bolloré ») mais le deal courait toujours…
Ce n’est pas très gentil de se moquer d’un homme à terre, mais relisons les passages de l’interview de Lagardère dans Le JDD sur Amber qui, « oui », allait rester actionnaire du groupe : « Je connais les dirigeants d’Amber et je les apprécie. Les dissensions passées sont oubliées. » Mais ce que Nono a manifestement aussi oublié, c’est qu’Amber est un fonds activiste, et que la raison d’être d’un fonds activiste est d’acheter des actions et de les revendre en faisant de jolies plus-values.