Ça fait une paye que les salariés d’Europe 1 l’attendaient, ce moment. Des mois à ruminer, des mois que face à leurs questions la direction opposait un silence, heu, radio. Cette fois nous y sommes, ce mardi après-midi. À leur demande, les équipes sont conviées « à la présentation du projet de transformation d’Europe 1 à 15 h 00 depuis le studio Bellemare » (oui, « transformation » et « Bellemare » dans la même phrase, on ne rit pas, vous allez voir, ce n’est pas drôle). Sur l’écran défile la nouvelle campagne publicitaire d’Europe 1 censée illustrer le monde changeant que la station veut décrypter. Et avec ses slogans sursignifiants, elle a été plutôt mal vécue en interne : « Qui n’a pas encore fait son burn-out ? » Parfaitement bienvenu dans une boîte où ils se multiplient. « Peut-on encore commettre le crime parfait ? » Idoine quand un Vincent Bolloré vous rôde autour, décrivant des cercles concentriques. « C’était mieux avant, mais avant quoi ? » Eh bien, par exemple, avant qu’Arnaud Lagardère laisse son groupe partir à vau-l’eau. « Et vous, ça va ? » Déjà, ça n’allait pas terrible mais là, ça va encore moins bien pour les salariés d’Europe 1 depuis cette séance et la confirmation en toutes lettres par la direction de ce qu’ils craignaient depuis des mois : « Vous êtes déjà salariés de Vincent Bolloré dans les faits. »
Bam, la phrase a été lâchée, comme ça, froidement, par Donat Vidal Revel, le directeur de l’information d’Europe 1, sous le feu des questions qui ont suivi la présentation, rapportent aux Jours plusieurs témoins, pantois. Mais ce n’était pas une petite phrase glissée au détour de cette réunion. Quelques instants plus tôt, c’est Constance Benqué, la patronne de Lagardère News, qui ouvre le bal de l’officialisation des noces avec Vincent Bolloré : « On a des concurrents qui ont des télés, déclare-t-elle, citant le cas de RTL avec M6, de RMC avec BFMTV. Si grâce à Vincent Bolloré, on peut aussi faire des ponts, ça peut être une force. » Elle poursuit : « Vincent Bolloré, il n’a pas un casque à pointe, il n’est pas là pour manger tout le monde. » Et puis, si même l’inconscient se met à parler… Là voilà passant la parole à Donat Vidal Revel : « Je vais laisser Vincent… » Avant de se reprendre dans un rire.
Il faut prendre Vincent Bolloré comme une opportunité.
Mais point de lapsus dans le discours de la direction d’Europe 1. Tour à tour, Vidal Revel et Benqué en remettent des couches et des couches.