Vincent Bolloré n’abandonne jamais. Sur le plan judiciaire du moins, l’homme d’affaires affiche une ténacité qui force l’admiration. Il perd un procès ? Il fait appel. Il perd en appel ? Il file en cassation. Cette semaine, cette règle de vie a tourné à l’abattage. Ce mardi, à Versailles, la cour examinait l’appel de Vincent Bolloré contre Complément d’enquête (France 2) et son journaliste Tristan Waleckx, relaxé en juin dernier (décision le 9 avril). Il y a deux semaines, c’était l’appel versant tribunal de commerce où il réclamait, oh deux fois rien, 50 millions d’euros à la chaîne publique (décision le 27 mars). Ce mardi encore, Nicolas Vescovacci et Jean-Pierre Canet, auteurs du livre Vincent tout-puissant (JC Lattès, 2018), apprenaient que deux plaintes venaient s’ajouter aux cinq déjà déposées contre leur ouvrage. Et ce jeudi, c’était le pompon avec l’ouverture du procès du journaliste de France Inter Benoît Collombat, poursuivi pour avoir relaté… le procès dont il a fait l’objet en 2010 de la part de notre pugnace homme d’affaires. Et ce, dans le livre collectif Informer n’est pas un délit (Calmann-Lévy, 2015), c’est piquant.
Car oui, pour Vincent Bolloré, informer est un délit. Et quand des journalistes tentent d’informer sur ses affaires africaines, c’est un superdélit. Car c’est là que se concentre l’essentiel des bénéfices de son groupe et de ses attaques en justice. Vingt, sur la période 2016-2018, a dénombré Juliette Félix, l’avocate de France 2 et de Tristan Waleckx, lors de l’audience à la cour d’appel de Versailles. Grat-grat-grat la tête, mais qu’a-t-il donc bien pu se passer à cette époque ? Eh bien oui, chers lecteurs de L’empire, c’est à cette période que Vincent Bolloré s’est retrouvé sous le feu des projecteurs après sa prise de pouvoir sur Canal+, son coupage de têtes massif (lire l’épisode 6, « “La terreur fait bouger les gens” »), son éradication d’i-Télé (lire l’épisode 43, « i-Télé, de grève lasse ») et puis, et puis, et puis tout ce qu’on vous raconte depuis 109 épisodes de notre saga… Pourquoi être si chatouilleux du côté de son business africain ? Simple, à en croire son conseil, le redouté Olivier Baratelli : « C’est que les journalistes écrivent des conneries sur l’Afrique alors qu’ils n’en écrivent pas sur la France », balance-t-il aux Jours. Parole d’avocat, bien sûr. Des « conneries », ça se discute, maître. Car si Olivier Baratelli attaque frénétiquement, il gagne rarement.