D’Israël
Dimanche 1er octobre. C’est le deuxième jour de Soukkot, la fête des cabanes, une des plus importantes dates du calendrier liturgique juif, à la fois fête des récoltes et commémoration de l’exode d’Égypte. Benyamin et Sara Netanyahou ont décidé de passer la semaine à Neve Ativ, sur le plateau du Golan, sorte de paradis des cow-boys sionistes vidé de sa population syrienne en 1967, après la guerre des Six Jours. Ce sont les deuxièmes vacances du couple dans ce petit village aux airs romands sur les contreforts du mont Hermon, le Mont-Blanc du Levant. Être ici, à 983 mètres d’altitude à la frontière avec le Liban et la Syrie, et pas dans les rues chics de Londres ou de New York que son épouse affectionne, c’est une concession aux nationalistes pour le Premier ministre israélien.
En prévision d’un rassemblement d’irréductibles opposants démocrates, on a fait précéder leur convoi d’un canon à eau, qui a dû péniblement se hisser le long des lacets qui mènent à Neve Ativ. Pour faire diversion, le chef du Likoud avait déclaré qu’il ne viendrait que le lundi, mais il est arrivé la veille au soir. Las, les manifestants poussent quand même les vuvuzelas jusqu’à tard dans la nuit. La fois précédente, les huées avaient été si nourries que les habitants du village ont tenté de décourager le Premier ministre de revenir en sollicitant la Cour suprême. Peine perdue. « Tout ce qu’on sait, c’est que, comme nous, les Netanyahou ne dorment pas bien la nuit », dit un résident de Neve Ativ, exténué.
Nous nous battons d’abord pour les règles du jeu démocratique, que “Bibi” veut changer à son avantage.
Le couple vit au centre de cercles concentriques de forces de sécurité : service secret, gendarmerie mobile, police montée… Il faut dire que cela fait plus de trois ans que Benyamin Netanyahou se bat contre un mouvement de protestation qui enfle. Au début, lui seul en était la cible, pris dans la tourmente de plusieurs affaires de corruption. Mais depuis 2022 qu’il a réussi à former un gouvernement en composant avec la plus extrême des droites, son cabinet essaie de pousser une révolution constitutionnelle, une réforme de fond des institutions judiciaires. Ses opposants y voient une manière de se débarrasser des poursuites, mais cela va plus loin. « On se bat parce qu’une dictature naît devant nos yeux », martèle Shikma Bressler, physicienne des particules devenue figure de la contestation.