Sault, Rise (Forever Living Originals, 2020)
Tout a commencé en 2019, lorsqu’un groupe nommé Sault a publié un disque nommé 5, puis un autre peu de temps après, 7. Puis Sault a remis ça cette année avec deux longs formats : Black Is, puis Rise. Ça fait beaucoup de musique en très peu de temps, sans que les artistes à l’origine de Sault ne soient jamais mis en avant. Aucune interview, aucune photo. Soit, à notre époque d’hypervisibilité et de course à l’attention, l’équivalent de courir tout nu au péage de Saint-Arnoult-en-Yvelines un dimanche soir en faisant des doigts d’honneur.
Or, la presse musicale n’aime pas le mystère. Comme chaque fois qu’un groupe a utilisé son droit au silence, elle s’est donc lancée sur les traces de Sault. On a déjà vécu ça mille fois, avec The Residents, Daft Punk, Wu-Lyf ou PNL, chaque fois qu’un artiste ou un groupe a rejeté la fuite en avant médiatique pour imposer son rythme. Il faut toutefois avoir la musique qui va avec pour que le stratagème fonctionne et Sault l’a sans aucun doute, notamment dans son dernier album en date, Rise. Vanity Fair ou le Guardian y sont donc allés de leur enquête à leurs risques et périls dans les bas-fonds de l’underground musical, alors qu’à bien y regarder, il n’y a pas vraiment de mystère chez Sault : la quasi-intégralité des titres publiés jusqu’à aujourd’hui sont crédités, sur les plateformes où ces informations sont disponibles, à trois musiciens : Cleopatra Nikolic, alias Cleo Sol, qui a publié un premier album solo cette année et travaillé avec la rappeuse britannique Little Simz ; Dean Josiah, alias Inflo, producteur du soulman Michael Kiwanuka comme de… Cleo Sol ; et Melisa Young, alias Kid Sister, qui a signé des titres avec Kanye West ou Chromeo. Le tout sur le label anglais Forever Living Originals, qui a publié le dernier album de Little Simz.
En ajoutant que Michael Kiwanuka est crédité sur une chanson de l’album Black Is, on repassera pour le mystère et le nébuleux. Sault est le groupe d’une poignée de musiciens de l’ombre mais pas d’inconnus. C’est surtout l’œuvre, d’une densité surprenante, d’une catégorie d’artistes qui ne sont que rarement mis en avant mais qui sont plus essentiels que jamais dans la musique du XXIe siècle. Ceux qui écrivent, produisent voire chantent en studio pour les stars qui mettront leur nom sur le disque à la fin. Les producteurs,