Billie Eilish, When We All Fall Asleep, Where do We Go ? (Darkroom/Interscope, 2019)
Tiens, c’est déjà la fin de l’année
Quand cet album a paru, j’en avais déjà marre de Billie Eilish, que le plan média de son label Interscope, c’est-à-dire Universal, essayait d’imposer comme la nouvelle coqueluche des internets émotifs et des YouTubeuses qui dessinent des licornes partout. Cette phase-là de sa carrière n’était pas très intéressante, qui l’a vue émerger stratégiquement dans le pseudo-underground de Soundcloud avant d’empiler les millions de streams avec une poignée de chansons dont Ocean Eyes, une ballade moderne et économe qui ne disait pourtant pas grand-chose de la capacité de Billie Eilish à être autre chose qu’une chanteuse de plus, juste un peu plus cyberpunk que d’autres. Mais elle a su s’entourer, en l’occurrence d’une équipe de managers nommée « The Dark Room », qui a négocié ses relations avec Interscope et sa liberté artistique. Ce qui lui a permis, au moment de passer à la suite d’Ocean Eyes, de bazarder l’idée d’enregistrer dans un studio trop rigide qui l’aurait cadenassée. À la place, elle s’est repliée dans l’endroit qu’elle maîtrisait le mieux : sa maison d’enfance à Los Angeles et la chambre où elle a grandi avec son frère Finneas, qui s’apprêtait à décoller comme producteur lorsqu’ils ont commencé à travailler ensemble sur Ocean Eyes, qu’il a composée. C’est finalement lui qui a écrit et enregistré tout ce qui est devenu When We All Fall Asleep avec sa petite sœur.
Ce fut une décision cruciale pour ce vrai disque de frère et sœur plein de vécu commun et d’engueulades qui construisent. Un disque où l’on peut tout se dire, alors que les hésitations et les arrangements d’un studio classique l’auraient en partie éteint.