Kali Malone, All Life Long (Ideologic Organ, 2024)
Le nouvel album de l’Américaine Kali Malone, All Life Long, s’ouvre sur un chœur d’hommes qui interprètent un texte en italien écrit par le philosophe Giorgio Agamben en 2007. Il y réfléchit sur la notion de « profanation »
En réponse à cette vision du monde, All Life Long est un album d’une profondeur infinie, le plus abouti de Kali Malone à ce jour en même temps que son plus accessible, mais il a avant cela été une longue aventure très personnelle pour la jeune trentenaire. Après une enfance dans les montagnes du Colorado et une adolescence en roue libre où elle s’est vue un temps en agricultrice avant de se tourner vers la composition musicale, elle a participé à divers groupes de rock de plus en plus avant-gardistes, quittant la quête mélodique pour des sensations plus abstraites jouées au synthétiseur ou au gong. C’est dans cette communauté musicale de l’underground expérimental qu’elle a croisé la Suédoise Ellen Arkbro, aventurière des environnements sonores manipulés en direct, avant de la rejoindre à Stockholm pour entrer au très sérieux Royal College of Music. Là, Kali Malone s’est prise de passion pour l’histoire des orgues d’église, leur rôle social et leurs systèmes d’accordage qui changeaient de paroisse en paroisse. Ces orgues parfois monumentaux étaient les instruments rois du Moyen-Âge et de la Renaissance, dont la puissance et les vibrations envahissaient le corps des fidèles pour appuyer les airs joués lors des messes et des événements qui marquaient le temps.
C’est cette capacité physique à déplacer l’air qui fascine Kali Malone et qu’elle interroge dans sa musique depuis son album The Sacrificial Code de 2019, où elle faisait, en pirate érudite, la jonction grondante entre les mondes de l’électroacoustique, du drone metal et des musiques liturgiques.