Il a rouvert, le Montenvers ! L’annonce faite par la Compagnie du Mont-Blanc qui exploite ce petit train à crémaillère a sonné comme le clairon de la libération – et de la reprise économique – chez les habitants de Chamonix fraîchement déconfinés. Le samedi 16 mai, moyennant quelques gestes barrières et comportements adaptés à la pandémie de Covid-19 qui traîne, les touristes ayant osé bouger un orteil de chez eux pouvaient de nouveau emprunter le tortillard qui grimpe depuis la vallée de Chamonix, en Haute-Savoie, pour aller contempler la Mer de Glace, le plus célèbre glacier hexagonal. Ou plutôt ce qu’il en reste. Autant se mettre tout de suite dans le bain. Après deux mois d’assignation à résidence, rien de tel qu’une ascension par le Montenvers pour se rappeler à quoi ressemblera le monde d’après si on ne fait rien pour changer le monde d’avant (lire l’épisode 5, « “Si l’effort de relance ne se fait pas en ayant en tête le climat…” ») : on monte pour contempler la majesté de la montagne et on tombe sur une carte postale du changement climatique.
C’est peut-être d’ailleurs ce souvenir qu’Emmanuel Macron a convoqué avant de se lancer dans sa tirade du 13 avril qui suggérait de « bâtir un autre projet dans la concorde » (lire l’épisode 48 de la série En quarantaine). Car à peine un mois avant d’être confiné à l’Élysée, il y était, le Président, au chevet de la Mer de Glace. Cela semble une éternité. Mais en cette mi-février, il est alors question d’expliquer aux Français que les ambitions écologiques de son quinquennat n’ont pas été ensevelies sous la crise sociale, alors symbolisée par les gilets jaunes et la contestation à la réforme des retraites. Alors, pour bien marquer le coup, on va au plus efficace. La Mer de Glace, à Chamonix, c’est le lieu emblématique pour signifier que cette histoire de réchauffement, c’est une priorité. Comme tous les touristes, le président de la République a dû prendre, depuis la vallée, le petit train à crémaillère du Montenvers – il a dormi au refuge du même nom –, qui grimpe jusqu’à une terrasse, avec vue imprenable sur ce fier patrimoine alpin : une langue blanche de sept kilomètres qui serpente majestueusement et rétrécit comme peau de chagrin d’année en année. Sous l’effet du changement climatique, le glacier a perdu un kilomètre de longueur et 110 mètres d’épaisseur dans les trente dernières années. Pour aller tâter de la glace elle-même, il faut emprunter une télécabine, puis un escalier de 580 marches.